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L'ABC des vices cachés (2014-05-06)

 

L’ABC des vices cachés

La recherche et l’achat d’une nouvelle résidence représentent, normalement, une étape, un changement agréable et réjouissant dans la vie d’une personne, d’un couple ou d’une famille. Dans l’excitation de l’achat anticipé, il est facile de vouloir agir promptement et ainsi d’importantes étapes peuvent être négligées.

La présente capsule d’informations se voulant légèrement paternaliste, mieux vaut en prendre connaissance à l’aube de toutes démarches visant l’achat d’une résidence. Dans le cas contraire, vous saurez globalement ce que vous devez faire dans un cas malheureux de vices cachés.

Le présent texte porte essentiellement sur les principes de base de la garantie légale lesquels sont exposés de façon aussi détaillée que possible dans ce contexte global général de nouvelle juridique. Le texte est truffé d’exemples concrets afin de faciliter la compréhension des principes.

Pour clore le sujet, nous exposerons les démarches à suivre suite à la découverte de vices affectant une résidence, les délais et frais à anticiper.


La garantie légale

Le concept juridique de garantie légale comprend à la fois ce que l’on appelle A) la garantie de qualité et B) la garantie du droit de propriété.

La première vise les vices cachés alors que la seconde s’affère aux vices de titre. Ces garanties existent de plein droit, sans qu’il ne soit nécessaire de les stipuler dans un contrat d’achat, vente ou d’échange. Le vendeur y est tenu, à moins que, du consentement des deux parties, la portée de la garantie ne soit limitée. Nous déconseillons à l’acheteur de limiter la portée de la garantie légale puisqu’il n’a aucun intérêt à le faire, outre peut-être la négociation sur le prix de vente. Toute limitation à l’acte de vente devrait être claire et précise, de manière à ce que l’acheteur sache exactement ce à quoi il renonce et ce qu’il est prêt à supporter, sans recours contre le vendeur dans l’avenir.

A) La garantie de qualité - le vice caché

Le vice caché, dans le domaine de l’immobilier, est un défaut qui affecte une résidence de manière assez importante pour dire que si l’acheteur en avait eu connaissance il n’aurait pas acheté ou, à tout le moins, aurait payé un prix inférieur. Le droit québécois présente quatre conditions pour établir l’existence d’un vice caché[1]; Il faut pouvoir démontrer 1) l’importance de la gravité du vice, 2) son caractère caché, 3) l’antériorité à la vente, de même que 4) l’ignorance de l’acheteur de l’existence de ce vice.

1) La gravité du vice

Pour donner lieu à la résolution d’une vente, ce qui a pour effet de remettre le vendeur et l’acheteur dans l’état où ils étaient avant la vente, le vice doit être suffisamment grave pour rendre l’immeuble impropre à l’usage auquel il est destiné[2].  Il n’est pas nécessaire que le défaut empêche totalement l’utilisation de l’immeuble, mais il doit en réduire l’utilité ou en empêcher l’usage normal. Il doit s’agir d’un empêchement important et non d’une simple diminution de la performance.

Voici quelques exemples tirés de cas réels :

·       des infiltrations d’eau par le toit[3] et dans le sous-sol[4] constituent des vices graves qui rendent impropres à un usage normal auquel on destine la résidence, ou qui, à tout le moins, diminuent assurément l’utilité de la maison;

·       un ancien réservoir à l'huile perforé enterré sous le patio; qui permet l'écoulement de résidus d'huile et qui doit être enlevé[5];

·       l’odeur insoutenable de chat dans une maison mobile a été considérée comme un vice caché puisque, au moment des visites précédant la vente, l’odeur de chat était cachée par l’odeur de cigarette. L’acheteur avait acheté malgré l’odeur de cigarette sachant que le nettoyage et le peinturage viendraient à bout de cette odeur, mais l’odeur de chat était imprégnée. Il n’a pas eu droit à la résolution de la vente, mais a reçu un montant équivalant à la réduction du prix de vente (2 000,00$)[6];

·       une infestation de fourmis charpentières est considérée comme un vice caché, ce qui donne lieu au remboursement des frais engagés pour l’extermination[7];

·       l’absence d’isolation, dans une maison qui avait subi l’ajout d’une partie moderne, était difficilement décelable et pouvait constituer un vice caché[8];

Par contre, un manque d’isolant dans les murs d’une maison de plus de 50 ans relève davantage de l’ordre d’une défectuosité fonctionnelle et même d’une particularité des maisons de l’époque que d’un vice caché[9]. Un vice n’est pas caché lorsqu’il est prévisible d’après la nature de la maison.

 

Il est à noter que les règles de l’art, en matière de construction, consignées dans le Code national du bâtiment du Canada, n’ont aucun caractère contraignant. Elles constituent davantage un guide de référence en matière de construction[10]. Donc, même si un immeuble ne respecte pas le code du bâtiment, il ne s’agit pas nécessairement d’un vice caché. Pour être établi comme tel, le défaut de conformité doit empêcher l’usage normal[11] du bien.

 

À l’inverse, la construction conforme aux normes n’empêche pas la constitution d’un vice caché. En effet, le principe de vice caché ne dépend ni de la faute, ni de la mauvaise foi du vendeur, pas plus qu’il ne dépend du respect des normes établies[12]. L’immeuble doit rendre l’usage auquel l’acheteur est en droit de s’attendre. L’usage est procuré ou il ne l’est pas. S’il ne l’est pas, il s’agit d’un vice à la garantie du vendeur. 

 

Le vice caché de moindre importance ne donne pas lieu à la résolution de la vente. Par contre, il donne accès à la réduction proportionnelle de son obligation corrélative[13], ce qui signifie communément une réduction du prix de vente.

 

Il est important de préciser également que la notion de «vice» peut évoluer ou se préciser selon les époques. Cependant, le vice doit toujours être évalué d’un point de vue objectif et non selon l’appréciation subjective propre à la personnalité de l’acheteur en cause.

 

Exemple - Vice caché qui n’en est plus un aujourd’hui: jadis, la présence de fantômes dans une demeure était considérée comme un vice susceptible d’entraîner la résolution de la vente. Bien entendu, aujourd’hui, de telles croyances ne sont plus admises à titre de vice caché;

 

·       Exemples - Vice subjectif: une dame demande des dommages-intérêts parce que le vendeur ne lui a pas mentionné qu’un suicide avait eu lieu dans une pièce de la maison[14]. La dame, ayant investi 15 000$ de rénovations, ne voulait pas nécessairement quitter les lieux et c’est la raison pour laquelle elle a demandé des dommages intérêts plutôt que la résiliation de la vente. Elle alléguait que son conjoint et sa famille avaient de la difficulté à aller dans la pièce où l’évènement tragique s’était passé. Le tribunal avait répliqué qu’à ce moment là « ce n'est pas un recours en dommages qu’on aurait dû intenter, mais une demande de résiliation du contrat[15] » et ainsi fonder son recours sur la théorie de l’erreur, qui vicie le consentement. En effet, la cohérence suppose qu’en présence d’une condition avec laquelle l’acheteur ne peut vivre, il y a lieu de ne plus demeurer dans cette résidence et non d’obtenir une diminution du prix de vente et de continuer à y demeurer.

 

Le vendeur n’a pas à déclarer les événements de sa vie, qu’ils soient heureux ou malheureux, ils n’ont aucun impact sur la valeur de l’immeuble. Toutefois, l’acheteur, pour lequel ces évènements peuvent constituer une raison de ne pas acheter, devrait poser des questions à cet effet. Donc, les vices couverts se limitent aux dépréciations de valeur objectivement appréciable. Les faits qui ont une valeur subjective, ne doivent pas être tenus en compte, par exemple:

 

·       Exemple: « […] pour un amateur de hockey, acheter une résidence qui a déjà été habitée par une vedette peut être une considération subjective pour payer un peu plus cher. À l'inverse, il peut arriver qu'on ne veuille, pour aucune considération, acheter une résidence qui a déjà appartenu à un adversaire politique. Mais aucune de ces considérations ne peut constituer un facteur objectif d'augmentation ou de diminution de la valeur de la bâtisse.[16] »

2) Le caractère caché du vice

Le principal argument du vendeur pour se défendre contre les prétentions de vices cachés, alléguées par l’acheteur, vise ce caractère. Le vice apparent ou le vice dénoncé à l’acheteur empêche le recours contre le vendeur[17]. Il est indispensable que le vice soit non apparent pour donner ouverture à un recours. Est considéré apparent, le vice que l’acheteur a décelé ou qu’il aurait pu déceler au moment de la vente s’il avait procédé à un examen raisonnable de l’immeuble. Il est donc nécessaire pour l’acheteur de se renseigner et d’être prudent et diligent lors de la visite des lieux. Par contre, il n’y a pas d’obligation de recourir à l’examen préalable d’un expert, puisque, le test effectué par un juge lors d’un recours, à savoir s’il s’agit d’un vice apparent ou caché, sera de se demander si un acheteur raisonnable, placé dans les mêmes circonstances, aurait pu déceler le vice au moment de la vente[18].

 

En général, le caractère caché du vice est apprécié de façon objective, mais il faut préciser que les tribunaux prennent en compte la compétence technique de l'acheteur, le cas échéant, ce qui est un facteur d'ordre subjectif[19]. Plus l’acheteur possède des connaissances élevées dans le domaine de la construction ou des systèmes et des composantes d’une maison, plus cela jouera contre lui lors de l’évaluation du caractère apparent du vice.

 

La possibilité de découvrir le vice suffit parfois pour établir qu’il n’est pas caché lorsqu’on est en présence d’indices ou de signes révélateurs susceptibles de soulever des soupçons[20].

 

Par exemple, des plafonds ou murs bombés ou cernés peuvent laisser croire à des infiltrations. À tout le moins, leur apparence nécessite une inspection plus poussée. De la même manière, des fissures dans les fondations devraient suffire à sonner l’alarme de l’acheteur prudent et diligent.

 

Pour ce qui est de l’examen sérieux de l’acheteur, les circonstances doivent être prises en considération. Par exemple, « acheter un vieil immeuble sans recourir à un expert, ne serait-ce que pour fournir les éléments d’évaluation appropriés pour fixer le prix d’achat, compte tenu des travaux nécessaires pour corriger certains défauts, peut s’avérer une imprudence [21]».  C’est pourquoi, dans certains cas particuliers en présence d’indices inquiétants, ne pas recourir à un expert, pourra être perçu comme un manque de prudence et diligence[22].

 

Les cas suivants sont des exemples où ne pas recourir à un expert peut s’avérer une imprudence:

 

·       pour l’achat d’une maison qui n’a pas été utilisée depuis plus de 2 ans et où l’eau avait été coupée[23];

·       l’achat d’une maison centenaire dotée d’une fosse septique[24];

 

Un faible prix étant également un indice qui doit inciter l'acheteur à une plus grande vigilance.

 

Mais en l’absence d’indices, le défaut d’expertise n’a aucun impact puisque la question est simplement de savoir si un acheteur prudent et diligent aurait décelé le vice et non de savoir si un expert l’aurait fait. Il est manifeste que s’il est nécessaire d’avoir recours à des connaissances approfondies pour déceler le vice, celui-ci est nécessairement caché.

 

Nous conseillons toujours à nos clients de faire inspecter l’immeuble qu’ils s’apprêtent à acquérir. Il est préférable de faire affaire avec un inspecteur en bâtiment membre d’une association et donc détenteur d’une assurance responsabilité. En effet, lorsqu’un inspecteur est consulté, avant la vente, pour l’examen d’un immeuble, il est responsable des défauts apparents qu’il n’a pas constatés, alors que le vendeur demeure responsable des vices cachés. Ainsi, un recours pourrait viser le vendeur  (pour les vices déclarés cachés par un tribunal) et l’inspecteur (pour les vices qui seraient déclarés apparents). Mieux vaut alors que l’expert que vous aurez choisi soit assuré en cas de responsabilité plutôt qu’un proche, ami ou connaissance en qui vous avez confiance et qui possède quelques compétences en matière de construction.

 

Par ailleurs, le rapport de l’inspecteur sera fort utile à savoir; si une inspection plus poussée devrait être réalisée, si une diminution de prix devrait être envisagée ou encore si des facteurs significatifs défavorables militent tout simplement en faveur du refus de l’offre du vendeur.

 

Exceptions au critère de l’apparence du vice

La règle du vice apparent reçoit exception lorsque le vendeur a un comportement fautif. Un vice apparent devient « juridiquement caché » lorsque le vendeur fait de fausses représentations, use de manœuvres dolosives ou ment à l’acheteur[25]. Ce sera le cas, notamment, lorsque le vendeur camoufle un problème existant, en amoindrit l’importance réelle de manière à induire en erreur[26], ou encore s’il en va de déclarations rassurantes pour inciter indûment l’acheteur à ne pas pousser plus loin son examen[27].

 

·       Exemple - Le vendeur camoufle un problème existant: un tapis peut avoir été posé dans le but de camoufler un vice du plancher;

·       Exemple - Le vendeur amoindrit l’importance réelle d’un vice: dénoncer de légères infiltrations d'eau au printemps alors qu'il s'agit d'infiltrations importantes et généralisées[28] ;

·       Exemple – Le vendeur fait des déclarations rassurantes pour inciter l’acheteur à ne pas pousser plus loin son examen: l’acheteur remarque des signes d’infiltrations d’eau et le vendeur lui énonce faussement que le tout a été réparé depuis lesdites infiltrations[29]. L’acheteur n’a donc pas à pousser plus loin son examen et le vendeur ne pourra opposer l’évidence des vices puisqu’il les a rendus juridiquement cachés par ses affirmations.

 

Le vice apparent devient juridiquement caché surtout lorsque l’acheteur demande des explications au sujet de manifestations de défauts et qu’on l’oriente sur une fausse piste. Cela découle du fait qu’on ne peut reprocher à l’acheteur de soupçonner la mauvaise foi de son vendeur[30]. Ce type de manœuvre du vendeur pour convaincre l’acheteur hésitant constitue un dol et permet l’ouverture du recours en nullité de vente ou en diminution de prix[31] de même qu’en réparation du préjudice subi[32].

 

3) L’antériorité du vice à la vente

Bien entendu, le vice ne doit pas résulter de l’occupation ou l’usage du nouveau propriétaire, mais bien exister avant la vente, même si son apparition ou sa découverte ne s’est faite que de manière graduelle.

Exemples de vices qui apparaissent de manière graduelle :

·       après 2 semaines de l’achat, l’acheteur s’aperçoit de la présence de moisissure à l’intérieur des murs, il est évident que le défaut était antérieur à la vente;

·       dans le cas des fourmis charpentières, dépendamment de la quantité, un expert sera en mesure de déterminer si les nids sont là depuis quelques mois ou depuis plusieurs années.

 

Le fardeau de prouver que le vice est antérieur à la vente incombe à l’acheteur[33]. Cependant, certaines présomptions en facilitent la preuve comme en cas de vente par un vendeur professionnel lorsque le mauvais fonctionnement du bien ou sa détérioration survient prématurément[34]. Bien entendu, l’usure normale d’un immeuble est exclue du recours à l’encontre de vices cachés.

 

L’antériorité du vice est également présumée lorsque l’acheteur en avise le vendeur aussitôt qu’il en prend connaissance et qu’elle survient dès la délivrance de l’immeuble ou peu de temps après[35], c’est-à-dire peu de temps après que l’acheteur se soit installé dans la maison.

 

 

 

4) Le vice inconnu de l’acheteur

 

La dernière caractéristique du vice caché relève de l’ignorance du vice par l’acheteur. Il va de soi que, si le vice est connu de l'acheteur, il ne peut s’en plaindre par la suite[36]. Cette connaissance de l’acheteur ne se présume pas et, puisque la bonne foi est présumée, le vendeur a la charge de démontrer soit que le vice était apparent ou qu’il a été dénoncé.

 

Le vice dénoncé et accepté tel quel par l’acheteur ne pourra par la suite faire l’objet d’un recours. C’est pourquoi il est très important d’inscrire dans l’acte de vente tous les signalements de vices qui auraient été faits à l’acheteur par le vendeur. Il est à noter que les mentions insérées au contrat de vente stipulant que l’acheteur « achète tel que vu et se déclare satisfait » ne visent que les défauts apparents et n’ont pas pour effet de soustraire le vendeur de sa responsabilité pour les vices cachés[37]

 

B) La garantie de propriété - le vice de titre

 

La garantie de propriété confère à l’acheteur la possession utile et paisible de son immeuble par le biais du vendeur qui est tenu de lui fournir un titre clair au moment de la vente, libre de tous droits, à l’exception de ceux qu’il a déclarés. Le vice de titre est celui qui prive l’acheteur de son droit de propriété ou qui le restreint.

 

a) Les hypothèques

À titre d’illustration, il y aurait vice de titre dans le cas où le vendeur n’aurait pas fait radier une hypothèque de son institution financière sur la résidence ou encore serait en retard dans le paiement de ses taxes municipales et scolaires puisque ces dernières comportent un droit direct dans le bien et peuvent ainsi être réclamées du possesseur subséquent (droit de suite[38]). Le vendeur doit donc libérer l’immeuble de toutes hypothèques pouvant le grever même de celles inscrites au registre foncier et celles déclarées, à moins bien sûr que l’acheteur accepte de les assumer[39].

 

b) L’empiétement

Le vice de titre concerne également les empiétements sur l’immeuble qui privent l’acheteur de son droit de propriété ou le restreint en faveur du vendeur ou de tiers, ce qu’on appelle communément un trouble de fait.

 

L’empiétement est une occupation d’espace qui excède les limites d’un terrain. Par exemple, mentionnons les constructions (clôture, cabanon, haie de cèdre etc.) qui auront été érigées au-delà des limitations d’un immeuble. Qu’elles favorisent ou défavorisent l’acheteur, elles pourront un jour faire l’objet de l’achat forcé d’une parcelle de terrain ou du paiement d’une indemnité pour la perte temporaire de l’usage de cette parcelle.

 

Dans le cas d’un empiétement considérable, qui cause un préjudice sérieux ou qui aurait été fait de mauvaise foi, le propriétaire brimé peut contraindre l’auteur de l’empiétement à acquérir son immeuble et à lui en payer la valeur ou encore l’obliger à enlever les constructions qui font l’objet de l’empiétement[40].

 

L’empiétement peut donner lieu à la perte de la parcelle de terrain empiétée en faveur de celui qui la possède de façon paisible, publique, continue à titre de propriétaire pendant 10 ans, suite à une demande à la Cour supérieure[41], ce qu’on appelle la prescription acquisitive. Ce principe étant lui-même complexe, vous pourrez vous référer à une autre de nos capsules juridiques sur ce sujet afin d’en savoir davantage. Il est donc important pour l’acheteur de connaître l’existence d’empiétement sur l’immeuble, le cas échéant.

 

c) Les violations aux limitations de droit public

Les limitations de droit public comprennent, entre autres, les règlements de zonage, les règlements municipaux adoptés pour des fins de sécurité, de protection de l’environnement ou d’hygiène qui touche l’immeuble.

 

Par exemple, si un commerce est exploité dans une zone résidentielle en vertu d’un droit acquis, l’acheteur doit savoir qu’il ne pourra jamais agrandir le commerce, ni en interrompre ou cesser l’exploitation pour une certaine période (dépendamment de la réglementation municipale) sans que son droit acquis à l’exploitation commerciale ne s’éteigne.

 

Si par contre l’exploitation était simplement tolérée par la municipalité, aucun droit ne résulte de cette tolérance[42]. Donc, la tolérance peut cesser à tout instant.

 

d) Les autres droits

Les autres droits comprennent notamment les servitudes de passage, de vues ou des prohibitions de construction qui restreignent la liberté d’usage du propriétaire sur son immeuble, il doit en avoir connaissance pour contracter de manière éclairée.

 

La visite préliminaire

 

Avant même la première visite, pensez à imprimer et conserver, dans un dossier personnel, la fiche de l’offre de vente (annonce).  En général, beaucoup d’informations s’y trouvent et vous pourriez en avoir besoin ultérieurement (peut-être même plusieurs années après l’achat).

 

Lors de la première visite, vous pourrez revoir les informations de la fiche de vente, et ce afin de vous assurer de leurs exactitudes. Cette visite vise à confirmer ou infirmer votre intérêt pour la résidence, bien que vous deviez tout de même garder l’œil ouvert sur toute anomalie.

 

Puisque les écrits restent et les paroles s’envolent, mieux vaut que l’objet des discussions avec le vendeur soit consigné dans tout contrat préalable et subséquent et signé par les deux parties. De deux choses l’une; vous éviterez ainsi que le vendeur ne vous rassure verbalement de sorte que cela vous pousse à laisser tomber une étude approfondie et, le vendeur sera beaucoup plus raisonnable dans sa déclaration rassurante s’il doit la mettre par écrit et la signer.

 

Ainsi, si le vendeur vous dit que des infiltrations d’eau sont déjà survenues par le passé, mais que le tout a été réparé et qu’il n’entre plus d’eau, cela devra entièrement être écrit dans la promesse d’achat (s’il en est une) et dans le contrat de vente notarié.


L’avis écrit au vendeur

 

Dans le cas malheureux où, une fois installé dans votre nouvelle résidence, vous décelez un vice caché (ou un vice de titre), la première démarche que vous devez obligatoirement effectuer est de dénoncer par écrit au vendeur le vice et ce dans le plus court délai possible depuis sa découverte[43]. La lettre doit, en plus de dénoncer le vice, indiquer au vendeur qu’il est responsable de ce vice, qu’il dispose d’un délai précis pour remédier audit défaut, autrement à l’expiration du délai des recours seront entrepris contre le vendeur. Vous ne devez faire aucune réparation avant l’expiration de ce délai.

 

Assurez-vous de dater votre écrit, d’en conserver une copie et de transmettre l’écrit par un moyen qui vous permette d’avoir une preuve de sa réception. Bien souvent, on nous dit ne pas avoir été aussi procéduraux lors de la dénonciation au vendeur puisque le vendeur n’était pas un total étranger et donc tout s’est fait verbalement. Même si le vendeur est votre meilleur ami, transmettez un écrit. Suivant la réception de cet écrit, le vendeur peut déjà contacter son assureur responsabilité. Par ailleurs, le fait qu’un vice soit découvert ne signifie pas que le vendeur soit de mauvaise foi. Il est même possible qu’il n’ait jamais eu connaissance dudit vice pendant qu’il était propriétaire de la résidence. Malgré tout, le vendeur n’en demeure pas moins responsable.

 

Ladite dénonciation est capitale et à défaut d’avoir donné l’occasion au vendeur de prendre connaissance du vice et de le réparer, un tribunal pourrait rejeter votre demande en justice sans aucune autre considération.


Les procédures judiciaires

 

Une fois le délai au vendeur écoulé le vendeur peut :

1)    totalement ignorer votre demande;

2)    répondre qu’il n’est aucunement responsable de votre malheur;

3)    prendre connaissance du défaut dénoncé et faire une offre de règlement qui ne vous satisfait pas;

4)    prendre connaissance du défaut dénoncé et régler le problème à votre satisfaction.

 

Dans le dernier cas, tant mieux et veillez à consigner par écrit le règlement intervenu à votre satisfaction et préciser ce qu’il adviendra dans le cas où la réparation n’aurait pas été suffisante et se représenterait pour l’avenir. Par ailleurs, si la réparation à être effectuée a été offerte, mais pas encore réalisée, le fait de consigner l’entente par écrit vous permettra de faire entériner le règlement par un tribunal si jamais le vendeur se défilait subséquemment.

 

Dans le cas des trois premiers scénarios, le temps sera donc venu d’entamer des procédures judiciaires. De fait, l’acheteur dispose d’un délai de trois (3) ans depuis la découverte du vice pour introduire son recours contre le vendeur. Mieux vaut agir promptement malgré le délai qui peut paraître généreux.


La durée et les coûts des procédures

 

Lorsque des procédures pour vices cachés sont entamées, il faut savoir que le dossier peut s’étendre sur deux (2), trois (3) et même parfois jusqu’à quatre (4) ans, dépendamment de la collaboration de la partie adverse, des expertises et contre-expertises qui peuvent être requises et de toutes les procédures secondaires au dossier principal.

 

Par ailleurs, il faut s’attendre à débourser environ entre 4 000,00 $ et 15 000,00 $ d’honoraires d’avocats pour ce genre de dossier. De fait, notre système de justice comporte des délais non négligeables et n’offre pas de justice permettant la pleine compensation des pertes subies puisque les frais d’avocats, entre autres, ne sont, sauf en de très rares exceptions, jamais remboursés par la partie adverse. C’est donc dire que, si vous avez une réclamation de 25 000,00 $ et des honoraires d’avocat de 5 000,00 $, bien que le tribunal vous accorde votre réclamation entièrement, il ne vous restera que 20 000,00 $ au final.  

 

On dit souvent que le pire des règlements vaut le meilleur des procès. C’est pourquoi nous proposons, autant que possible, les modes alternatifs de règlement de conflits et suggérons toujours à nos clients de considérer sérieusement les offres de règlement à l’amiable qui leur sont soumises.  Des ententes à l’amiable surviennent parfois dès la procédure introduite par le demandeur et encore plus souvent le jour du procès entre les parties.

 

Me Catherine Fournier

Cette capsule d'information ne constitue pas une opinion juridique, mais bien de l'information d'ordre général, applicable au Québec seulement et à jour au moment de sa publication ou de sa révision, le cas échéant. Avant de prendre toute décision d’ordre juridique relativement au sujet traité, il est fortement recommandé de consulter un professionnel en bonne et due forme afin de vous assurer l’évaluation générale de votre situation qui peut être un cas particulier et donc, soumis à une application particulière.

 



[1] Code civil du Québec, L.Q. 1991, c. 64, (ci-après C.c.Q.), art. 1726

2 Dragon c. Crépeau-Lavallée 2009 QCCS 1132.

[3] Demanche c. Lacasse, 2010 QCCQ 553 (CanLII)

[4] Lavergne c. Desjardins, 2005 CanLII 47312 (QC C.Q.)

[5] Mercier c. Lafrance, 2004 CanLII 15263 (QC C.Q.)

[6] Tremblay c. Cyr, 2003 CanLII 10674 (QC C.Q.)

[7] Lessard c. Bélanger, 2008 QCCQ 10126 (CanLII), Pronovost c. Desautels, 2009 QCCQ 427 (CanLII), de nombreuses décisions rapportent ce genre de vice

[8] Richard Fortin c. Maurice Deschênes, C.Q., Québec, 200-22-010562-999, (2001) R.D.I. 151

[9] Boucher c. Sénécal, 2005 CanLII 48748 (QC C.Q.)

10 St-Onge c. Boivert, [2001] R.L. 95 (C.S.)

11 Richard c. Sauvageau , [1991] R.D.I. 513 (C.S.), Pigeon c. Beaudry, 1997 IIJCan 9266 (QC C.S.)

[12] Jeffrey Edwards, La garantie de qualité du vendeur en droit québécois, Montréal, Wilson & Lafleur, 2ème éd., 2008, p. 151

13 C.c.Q., art. 1604

[14] Knight c. Dionne, 2006 QCCQ 1260

[15] Knight c. Dionne, précité, note 19, para. [56]

[16]Knight c. Dionne, précité, note 19, para. [41]

18 C.c.Q., art. 1726 al.2

19 ABB Inc. c. Domtar Inc., [2007] 3 R.C.S. 461, 2007 CSC 50

[19] P.-G. JOBIN, La vente, Cowansville, Éd. Y. Blais inc., 2001, p. 159-160

21 Brisebois c. Ouimette, AZ-50098275

[21] Lafrance c. Prévost, REJB 2001-26534 (C.S.), Gauthier c. Marcali, [2001] R.D.I. 177, REJB 2001-23151 (C.Q.),  cités dans Jacques DESLAURIERS, Vente, Louage, Contrat d'entreprise ou de service, Montréal, Wilson & Lafleur, 2005, p.148

[22] Lachance c. Duval, 2010 QCCQ 255, Jeffrey EDWARDS, La garantie de qualité du vendeur en droit québécois, 2e éd., Montréal, Wilson & Lafleur, 2008, p. 176 et 177

[23] St-Pierre c. Gagnon, 2007 QCCQ 1952 (CanLII).

[24] Leduc et al c. Dubé, REJB 2000-17844.

[25] Placement Jacpar inc. c. Benzakour, 1989 CanLII 976 (QC C.A.), [1989] R.J.Q. 2309 (C.A.); voir aussi dans le même sens Meaney c. Coulombe, J.E. 97-630 (C.A.).

[26] B. & R. Gauthier inc. c. Lemieux, [1977] C.S. 295; Maillet c. Potvin, J.E. 91-1221 (C.A.); Investissement Cigmont inc. c. Corrieri, B.E. 2001BE-1005 (C.A.); Tremblay c. Galipeau, J.E. 2003-1352 (C.A.); Landry c. Généreux, J.E. 96-541 (C.A.).

[27] Placement Jacpar inc. c. Benzakour, précité, note 30.

[28] Lafleur c. St-Yves B.E. 2000BE-115.

[29] Quesnel c. Pirsch, 2008 QCCQ 2811 (CanLII).

[30] Placement Jacpar inc. c. Benzakour, précité, note 32, para. [27]

[31] C.c.Q., art. 1407

[32] C.c.Q., art. 1607

[33] C.c.Q., art. 2803

[34] C.c.Q., art. 1729

[35] Durand c. Tremblay, B.E. 2001BE-468 (C.Q.); Lambert c. Bazin, EYB 2005-86617 (C.Q.)

[36] Francoeur c. Hulme, 2002 CanLII 23802 (QC C.S.)

[37] Jacques DESLAURIERS, Vente, Louage, Contrat d'entreprise ou de service, Montréal, Wilson & Lafleur, 2005, p. 155

[38] C.c.Q., art. 2654.1

[39] C.c.Q., art. 1723

[40] C.c.Q., art. 992

[41] C.c.Q., art. 922 et 2918

[42] Leduc c. Dubé, B.E. 2000BE-564, REJB 2000-17844 (C.Q.), cité dans Jacques DESLAURIERS, Vente, Louage, Contrat d'entreprise ou de service, Montréal, Wilson & Lafleur, 2005, p. 115

[43] C.c.Q., art. 1723

 

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